Page:Verne - Histoire des grands voyages et des grands voyageurs, Hetzel, 1870, tome 1.djvu/199

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une existence plus malmenée que celle du grand navigateur ? La fortune pouvait-elle frapper à coups plus redoublés ? Mais cet homme de génie, indomptable, infatigable, se relevant sous les épreuves, ne désespérait pas. Il avait le feu sacré, il travaillait toujours, visitant les personnages influents, répandant et défendant ses idées, combattant sans cesse avec l’énergie la plus héroïque. Enfin il finit par obtenir la protection du grand cardinal, archevêque de Tolède, Pedro Gonzalès de Mendoza, et grâce à lui il fut admis en présence du roi et de la reine d’Espagne.

Christophe Colomb dut croire alors qu’il touchait au terme de ses tribulations. Ferdinand et Isabelle accueillirent favorablement son projet, qui fut soumis à l’examen d’un concile de savants, de prélats et de religieux réunis ad hoc dans un couvent dominicain de Salamanque.

Mais le malheureux solliciteur n’était pas au bout de ses vicissitudes. Dans cette assemblée, il trouva tous ses juges contre lui. En effet, ses idées touchaient aux questions religieuses, si passionnées pendant le quinzième siècle. Les Pères de l’Église avaient nié la sphéricité de la terre, et, par conséquent, puisque la terre n’était pas ronde, un voyage de circumnavigation devenait absolument contradictoire avec les textes de la Bible et ne pouvait être logiquement entrepris. « D’ailleurs, disaient ces théologiens, si l’on parvenait jamais à descendre dans l’autre hémisphère, comment pourrait-on remonter dans celui-ci ?