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KÉRABAN-LE-TÊTU.

dangereux, ce dont il se préoccupait davantage. De plus, avec les fatigues inhérentes à ces longs parcours, il arriverait à maigrir et, par conséquent, à perdre de ce poids normal, — cent soixante-sept livres ! — auquel il tenait tant.

Et alors son éternel et lamentable refrain de revenir à l’oreille de son maître :

« Il vous arrivera malheur, monsieur, je vous le répète, il vous arrivera malheur !

— Nous le verrons bien, répondit le Hollandais ; mais va toujours chercher mes bagages, pendant que j’achèterai un guide pour étudier ces divers pays, et un carnet pour noter mes impressions ; puis, tu reviendras ici, Bruno, et tu te reposeras…

— Quand ?…

— Quand nous aurons fait le tour de la mer Noire, puisqu’il est dans notre destinée de le faire ! »

Sur cette réflexion fataliste, qu’un Musulman n’eût pas désavouée, Bruno, hochant la tête, quitta le comptoir et se rendit à l’hôtel. En vérité, ce voyage ne lui disait rien de bon !

Deux heures après, Bruno revenait avec plusieurs portefaix, munis de leurs crochets sans montants, retenus au dos par de fortes bretelles. C’étaient de ces indigènes, vêtus d’une étoffe feutrée, de bas de