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l’école des robinsons

— Ah ! qu’il est donc fâcheux que cette précieuse découverte n’ait pas encore été faite ! s’écria le professeur. Comme je respirerais volontiers une demi-douzaine de sandwiches et un quart de corn-beef, rien que pour me mettre en appétit ! »

Et Tartelett, plongé en une demi-rêverie sensuelle, dans laquelle il entrevoyait de succulents dîners atmosphériques, ouvrait inconsciemment la bouche, respirait à pleins poumons, oubliant qu’il avait à peine de quoi se nourrir à la manière habituelle.

Godfrey le tira de sa méditation, et le ramena dans le positif.

Il s’agissait de procéder à une installation plus complète à l’intérieur de Will-Tree.

Le premier soin fut de s’employer au nettoyage de la future habitation. Il fallut, d’abord, retirer plusieurs quintaux de cette poussière végétale, qui couvrait le sol et dans laquelle on enfonçait jusqu’à mi-jambe. Deux heures de travail suffirent à peine à cette pénible besogne, mais enfin la chambre fut débarrassée de cette couche pulvérulente, qui s’élevait en nuée au moindre mouvement.

Le sol était ferme, résistant, comme s’il eût été parqueté de forte lambourdes, avec ces larges racines du séquoia qui se ramifiaient à sa surface. C’était raboteux, mais solide. Deux coins furent choisis pour remplacement des couchettes, dont quelques bottes d’herbes, bien séchées au soleil, allaient former toute la literie. Quant aux autres meubles, bancs, escabeaux ou tables, il ne serait pas impossible de fabriquer les plus indispensables, puisque Godfrey possédait un excellent couteau, muni d’une scie et d’une serpe. Il fallait être à même, en effet, par les mauvais temps, de rester à l’intérieur de l’arbre, pour y manger, pour y travailler. Le jour n’y manquait pas, puisqu’il pénétrait à flots par l’ouverture. Plus tard, s’il devenait nécessaire de fermer cette ouverture au point de vue d’une sécurité plus complète, Godfrey essayerait de percer dans l’écorce du séquoia une ou deux embrasures qui serviraient de fenêtres.

Quant à reconnaître à quelle hauteur s’arrêtait l’évidement du tronc, Godfrey ne le pouvait pas sans lumière. Tout ce qu’il put constater, c’est qu’une perche, longue de dix à douze pieds, ne rencontrait que le vide, lorsqu’il la promenait au-dessus de sa tête.

Mais cette question n’était pas des plus urgentes. On la résoudrait ultérieurement.