Page:Verne - L’Étoile du sud, Hetzel, 1884.djvu/146

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
142
L’ÉTOILE DU SUD.

Un rugissement épouvantable répondit soudain à cette attaque !… C’était un lion que le jeune ingénieur venait de traiter ainsi comme un simple caniche.

Mais à peine avait-il eu le temps de mettre la main sur l’un des revolvers qu’il portait à sa ceinture et de faire un brusque écart de côté, que l’animal, après avoir bondi vers lui sans l’atteindre, se précipitait de nouveau sur son bras tendu.

Cyprien sentit des griffes aiguës lui labourer les chairs, et il roula dans la poussière avec le redoutable fauve. Une détonation retentit tout à coup. Le corps du lion s’agita dans une convulsion suprême, puis se raidit et retomba immobile.

De la main libre qui lui restait, Cyprien, sans rien perdre de son sang-froid, avait appliqué son revolver sur l’oreille du monstre, et une balle explosible venait de lui fracasser la tête.

Cependant, les dormeurs, avertis par ce rugissement suivi d’une détonation, arrivaient sur le champ de bataille. On dégagea Cyprien, à demi écrasé sous le poids de l’énorme bête, on examina ses blessures, qui n’étaient heureusement que superficielles. Lî les pansa simplement avec quelques linges mouillés d’eau-de-vie, puis la meilleure place lui fut réservée au fond du wagon, et bientôt tout le monde se rendormit sous la garde de Bardik, qui voulut veiller jusqu’au matin.

Le jour venait à peine de se lever, lorsque la voix de James Hilton, suppliant ses compagnons de venir à son aide, leur annonça quelque nouvel incident. James Hilton était couché tout habillé sur le devant du chariot, en travers de la bâche, et parlait avec l’accent de la plus vive épouvante, sans oser faire un mouvement.

« J’ai un serpent enroulé autour de mon genou droit, sous mon pantalon ! disait il. Ne bougez pas ou je suis perdu ! Et pourtant, voyez ce qu’il est possible de faire ! »

Ses yeux étaient dilatés par la terreur, sa face d’une pâleur livide. Au niveau de son genou droit, on distinguait, en effet, sous la toile bleue de son vêtement, la présence d’un corps étranger, — une espèce de câble enroulé autour de la jambe.

La situation était grave. Comme le disait James Hilton, au premier mouvement qu’il ferait, le serpent ne manquerait pas de le mordre !

Mais, au milieu de l’anxiété et de l’indécision générale, Bardik se chargea