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l’invasion de la mer

Une fois encore, le capitaine Hardigan voulut connaître le sort que le chef touareg leur réservait, et il questionna Ahmed.

Celui-ci, pas plus que Sohar la veille, ne consentit à répondre. Il avait sans doute des ordres à ce sujet, et il quitta la cour sans avoir prononcé une seule parole. Trois jours s’écoulèrent et n’apportèrent aucun changement à la situation. Chercher à s’évader du bordj, c’était impossible, du moins en escaladant les hautes murailles, escalade impossible à effectuer faute d’échelle. Peut-être, ces murs franchis en profitant de l’obscurité, le capitaine Hardigan et ses compagnons auraient-ils pu s’enfuir à travers l’oasis ? Il ne semblait même pas que le bordj fût surveillé extérieurement, et, ni le jour ni la nuit, un bruit de pas ne résonnait sur le chemin de ronde. À quoi bon d’ailleurs, les murs opposaient un obstacle infranchissable et la porte de la cour n’aurait pu être forcée.

Du reste, dès le premier jour de leur incarcération, le brigadier Pistache avait pu reconnaître la disposition de l’oasis. À la suite de maints efforts, et non sans avoir risqué cent fois de se rompre le cou, il était parvenu, en montant l’escalier délabré, à atteindre l’extrémité du minaret, décoiffé de sa calotte supérieure.

De là, en regardant à travers les dernières embrasures, assuré de ne point être aperçu, il avait observé le large panorama qui se déroulait à ses yeux.

Sous lui, autour du bordj, s’étendait la bourgade entre les arbres de l’oasis de Zenfig. Au-delà se prolongeait le territoire de l’Hinguiz sur une longueur de trois à quatre kilomètres à l’est et à l’ouest. Face au nord se rangeaient les habitations en plus grand nombre, très blanches au milieu de la sombre verdure. À la place occupée par l’une d’elles, à l’ensemble des constructions que ses murs entouraient, au mouvement qui se produisait devant sa porte, au nombre d’étendards dont la brise déployait l’étamine au-dessus de son entrée, le brigadier se dit,