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LE PHARE DU BOUT DU MONDE.

contraint de relâcher dans la baie d’Elgor, en se guidant sur le phare, il aurait toutes chances de gagner son mouillage. Au retour, le Santa-Fé pourrait donc facilement se rendre à la petite crique, même pendant la nuit. La baie ayant environ trois milles de longueur jusqu’à l’extrémité du cap Saint-Jean, et la portée de feu étant de dix, l’aviso en aurait encore sept devant lui avant d’être arrivé sur les premiers accores de l’île.

Autrefois les phares étaient pourvus de miroirs paraboliques, qui avaient le grave inconvénient d’absorber au moins la moitié de la lumière produite. Mais le progrès avait dit son mot en cette matière comme en toutes choses. On employait dès cette époque des miroirs dioptriques, qui ne laissent perdre qu’une faible partie de la clarté des lampes.

Il va sans dire que le Phare du bout du Monde possédait un feu fixe. Il n’était pas à craindre que le capitaine d’un navire pût le confondre avec un autre feu, puisqu’il n’en existait aucun sur ces parages, pas même, on le répète, au cap Horn. Il n’avait donc point paru nécessaire de le différencier, soit par des éclipses, soit par des éclats, ce qui permettait de supprimer un mécanisme toujours délicat, et dont les réparations eussent été malaisées sur cette île uniquement habitée par les trois gardiens.

La lanterne était donc munie de lampes à double courant d’air et à mèches concentriques. Leur flamme, produisant une intense clarté sous un petit volume, pouvait dès lors être placée presque au foyer même des lentilles. L’huile leur arrivait en abondance par un système analogue à celui des Carcel. Quant à l’appareil dioptrique disposé à l’intérieur de la lanterne, il se composait de lentilles à échelons, comprenant un verre central de forme ordinaire, qu’entourait une série d’anneaux de médiocre épaisseur et d’un profil tel que tous se trouvaient avoir le même foyer principal. Dans ces conditions, le faisceau cylindrique de rayons parallèles produit derrière le système de lentilles était transmis au dehors dans les meilleures conditions de