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LE PHARE DU BOUT DU MONDE.

Pendant les jours qui suivirent, la mer demeura presque déserte. À peine put-on entrevoir une ou deux voiles à l’horizon de l’est. Les navires qui passaient à une dizaine de milles de l’Île des États ne cherchaient évidemment pas à rallier la terre d’Amérique. Dans l’opinion de Vasquez, ce devaient être des baleiniers qui se rendaient sur les lieux de pêche, dans les parages antarctiques. On aperçut du reste quelques souffleurs qui venaient des latitudes plus élevées. Ils se tenaient à bonne distance de la pointe Several en se dirigeant vers l’Océan Pacifique.

Il n’y eut rien à noter jusqu’à la date du 20 décembre, si ce n’est des observations météorologiques. Le temps était devenu assez variable, avec des sautes de vent du nord-est au sud-est. À plusieurs reprises, il tomba des pluies assez fortes, parfois accompagnées de grêle, ce qui indiquait une certaine tension électrique de l’atmosphère. On pouvait donc craindre des orages qui ne laissent pas d’être redoutables, surtout à cette époque de l’année.

Dans la matinée du 21, Felipe se promenait en fumant sur le terre-plein, lorsqu’il crut apercevoir un animal du côté du bois de hêtres.

Après l’avoir observé pendant quelques instants, il alla prendre une longue-vue dans la salle commune.

Felipe reconnut sans peine un guanaque de grande taille. C’était peut-être l’occasion de faire un bon coup.

Aussitôt, Vasquez et Moriz, qu’il venait d’appeler, sortirent tous deux de l’annexe et le rejoignirent sur le terre-plein.

Tous furent d’avis qu’il fallait se mettre en chasse. Si l’on parvenait à abattre le guanaque, cela vaudrait un supplément de viande fraîche, qui varierait agréablement l’ordinaire.

Voici ce qui fut convenu : Moriz, armé d’une des carabines, quitterait l’enceinte, et essayerait, sans être aperçu, de tourner l’animal, qui restait immobile, et de le repousser du côté de la baie, où Felipe l’attendrait au passage.