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APRÈS LE NAUFRAGE.

l’échouage. Aucune épave ne surnageait à la surface de la mer ; mais, sous la formidable poussée du vent, il était possible que les débris eussent été rejetés au fond de la baie d’Elgor.

S’il en était ainsi, Kongre savait maintenant qu’un bâtiment venait de se perdre sur les récifs du cap San Juan.

Vasquez avait donc des précautions à prendre, et il ne s’avança qu’après s’être assuré que personne de la bande ne se trouvait encore à l’entrée de la baie.

En quelques minutes, il arriva sur le lieu de la catastrophe. La mer étant basse, il put faire le tour du bâtiment échoué, et, sur le tableau d’arrière, il lut : Century. Mobile.

C’était donc un voilier américain, ayant pour port d’attache cette capitale de l’État d’Alabama, au sud de l’Union, sur le golfe du Mexique.

Le Century s’était perdu corps et biens. On ne voyait aucun survivant du naufrage, et, quant au navire, il n’en restait qu’une carcasse informe. Au choc, la coque s’était partagée en deux. La houle en avait enlevé et dispersé la cargaison. Des débris de bordage, de membrures, d’espars, de vergues, gisaient çà et là sur les écueils, découverts maintenant malgré la violence des rafales. Des caisses, des ballots, des barriques, étaient épars le long du cap et sur la grève.

La carcasse du Century étant à sec, il fut possible à Vasquez de s’y introduire.

La dévastation y était complète. Les lames avaient tout saccagé. Elles avaient arraché les planches du pont, démoli les cabines de la dunette, brisé les gaillards, démonté le gouvernail, et le choc sur les récifs avait achevé l’œuvre de destruction.

Et personne de vivant, pas un des officiers, pas un des hommes de l’équipage !

Vasquez appela d’une voix forte, sans obtenir de réponse. Il pénétra jusqu’au fond de la cale et ne trouva pas un cadavre. Ou ces malheureux avaient été enlevés par quelque coup de mer,