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LE PHARE DU BOUT DU MONDE.

prendre sa retraite, les armateurs avaient résolu de lui confier le commandement du navire.

C’était pour lui un autre motif de colère et de haine. De ce navire dont il allait bientôt être le capitaine, il ne voyait plus maintenant que des débris informes livrés à une bande de pillards.

Si Vasquez avait jamais besoin qu’on relevât son courage, c’était bien là l’homme qu’il fallait !

Mais, si déterminés, si braves qu’ils fussent tous deux, qu’auraient-ils pu contre Kongre et ses compagnons ?

En s’abritant derrière les roches, Vasquez et John Davis observèrent prudemment le littoral jusqu’à l’extrémité du cap San Juan.

Kongre, Carcante et les autres s’étaient arrêtés d’abord à cet angle où l’ouragan venait de pousser une moitié de la coque du Century à l’état de débris entassés au pied de la falaise.

Les pillards se trouvaient à moins de deux cents pas de la grotte, d’où l’on distinguait facilement leurs traits. Ils étaient vêtus de capotes de toile cirée, étroitement serrées à leur taille afin de ne point donner prise au vent, et coiffés de surouëts qu’une forte patte maintenait au menton. Qu’ils eussent de la peine à résister à la poussée des rafales, cela se voyait. Parfois, il leur fallait s’arc-bouter contre une épave ou une roche pour ne point être renversés.

Vasquez désigna à John Davis ceux qu’il connaissait pour les avoir vus lors de leur première visite à la caverne.

« Ce grand, lui dit-il, là, près de l’étrave du Century, c’est celui auquel ils donnent le nom de Kongre.

— Leur chef ?

— Leur chef.

— Et l’homme avec lequel il cause ?

— C’est Carcante, son second… et, je l’ai bien vu d’en haut, un de ceux qui ont frappé mes camarades.