Page:Verne - Le Château des Carpathes.djvu/213

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« Stilla… ma chère Stilla, répète-t-il, toi que je retrouve ici… vivante…

— Vivante… la Stilla… vivante !… » s’écrie le baron de Gortz.

Et cette phrase ironique s’achève dans un éclat de rire, où l’on sent tout l’emportement de la rage.

« Vivante !… reprend Rodolphe de Gortz. Eh bien ! que Franz de Télek essaie donc de me l’enlever ! »

Franz a tendu les bras vers la Stilla, dont les yeux sont ardemment fixés sur lui…

À ce moment, Rodolphe de Gortz se baisse, ramasse le couteau qui s’est échappé de la main de Franz, et il le dirige vers la Stilla immobile…

Franz se précipite sur lui, afin de détourner le coup qui menace la malheureuse folle…

Il est trop tard… le couteau la frappe au cœur…

Soudain, le bruit d’une glace qui se brise se fait entendre, et, avec les mille éclats de verre, dispersés à travers la salle, disparaît la Stilla…

Franz est demeuré inerte… Il ne comprend plus… Est-ce qu’il est devenu fou, lui aussi ?…

Et alors Rodolphe de Gortz de s’écrier :

« La Stilla échappe encore à Franz de Télek !… Mais sa voix… sa voix me reste… Sa voix est à moi… à moi seul… et ne sera jamais à personne ! »

Au moment où Franz va se jeter sur le baron de Gortz, ses forces l’abandonnent, et il tombe sans connaissance au pied de l’estrade.

Rodolphe de Gortz ne prend même pas garde au jeune comte. Il saisit la boîte déposée sur la table, il se précipite hors de la salle, il descend au premier étage du donjon ; puis, arrivé sur la terrasse, il la contourne, et il allait gagner l’autre porte, lorsqu’une détonation retentit.

Rotzko, posté au rebord de la contrescarpe, venait de tirer sur le baron de Gortz.