Page:Verne - Le Chemin de France, Hetzel, 1887.djvu/74

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monsieur de Lauranay et sa petite-fille seront forcés de partir dans les vingt-quatre heures ! Et alors quelle cruelle séparation pour ces jeunes gens ! Au contraire, si le mariage est conclu, ou monsieur Jean emmènera sa femme en France, ou, s’il est forcé de rester à Belzingen, du moins y restera-t-elle avec lui !

— Tu as raison, Natalis.

— À ta place, Irma, j’en parlerais à Mme Keller, elle en parlerait à son fils, on se hâterait de conclure le mariage, et, une fois fait, nous pourrions laisser aller les choses.

— Oui, répondit Irma, il faut que le mariage se fasse sans retard. D’ailleurs, les empêchements ne viendront pas de Marthe !

— Oh non ! l’excellente demoiselle ! Et puis, un mari, un mari comme monsieur Jean, quelle garantie pour elle ! Songe donc, Irma, seule avec son grand-père, déjà ancien, forcée de quitter Belzingen, de traverser cette Allemagne encombrée de troupes ! Que deviendraient-ils tous deux ?… Il faut donc se dépêcher d’en finir, et ne pas attendre que ce soit devenu impossible !

— Et cet officier, me demanda ma sœur, est-ce que tu le rencontres quelquefois ?

— Presque tous les jours, Irma ! C’est un malheur que son régiment soit encore à Belzingen ! J’aurais voulu que le mariage de Mlle de Lauranay ne fût connu qu’après son départ !

— En effet, ce serait désirable !

— Je crains qu’en l’apprenant, ce Frantz ne veuille tenter quelque coup ! Monsieur Jean est homme à le remettre à sa place, et alors… Enfin, je ne suis pas tranquille !

— Ni moi, Natalis ! Il faut donc faire le mariage le plus tôt possible. Il y aura certaines formalités à remplir, et je redoute toujours que la mauvaise nouvelle n’éclate !

— Parle donc à Mme Keller.

— Aujourd’hui même. »

Oui, il importait de se hâter, et peut-être même, était-il déjà trop tard !