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LE PILOTE DU DANUBE.

fureur, au point de rendre la situation réellement critique. Si le Danube n’est pas comparable à la mer, il est toutefois assez vaste pour que de véritables lames réussissent à s’y former lorsque le vent acquiert une grande violence. Il en était ainsi, ce jour-là, et, malgré la hâte dont Ilia Brusch faisait preuve, force lui fut de se réfugier près de la rive gauche.

Il ne devait pas l’atteindre.

Plus de cinquante mètres l’en séparaient encore, quand surgit un effrayant phénomène. À quelque distance en amont, les arbres qui garnissaient la berge furent tout à coup précipités dans le fleuve, cassés net au ras du sol, comme s’ils eussent été rasés par une faux gigantesque. En même temps, l’eau, soulevée par une incommensurable puissance, monta à l’assaut de la rive, puis se dressa en une lame énorme qui roula en déferlant à la poursuite de la barge.

Évidemment, une trombe venait de se former dans les couches atmosphériques et promenait à la surface du fleuve son irrésistible ventouse.

Ilia Brusch comprit le danger. Faisant pivoter la barge d’un énergique coup d’aviron, il s’efforça de se rapprocher de la rive droite. Si cette manœuvre n’eut pas tout le résultat qu’il en attendait, c’est pourtant à elle que le pêcheur et son passager durent finalement leur salut.

Rattrapée par le météore continuant sa