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UN PORTRAIT DE FEMME.

dissimulait sa véritable personnalité, le mystère dont il s’entourait, ce nom qui était le sien et, en même temps, celui par lequel la rumeur publique désignait le chef des bandits, son absence de la nuit dernière concordant avec la découverte d’un nouveau crime, tout disait à Karl Dragoch qu’Ilia Brusch était bien le bandit recherché.

Mais ce bandit lui avait sauvé la vie !… Voilà qui compliquait étrangement la situation !

Quelle apparence qu’un voleur, plus qu’un voleur, un assassin se fût jeté à l’eau pour l’en retirer ? Et, quand bien même cette chose invraisemblable serait vraie, était-il possible, à qui venait d’être arraché à la mort, de reconnaître ainsi le dévouement de son sauveur ? Quel risque, d’ailleurs, à surseoir à une arrestation ? Maintenant que le faux Ilia Brusch était démasqué, que sa personnalité était connue, il lui serait impossible d’échapper aux forces de police disséminées le long du fleuve, et, dans le cas où l’enquête aboutirait en effet au soi-disant pêcheur, on disposerait alors d’un plus nombreux personnel, et l’arrestation serait opérée plus sûrement pour avoir été différée.

Karl Dragoch, pendant cinq minutes, retourna sous toutes ses faces le cas de conscience qui s’imposait à lui. Partir sans avoir revu Ilia Brusch ?… Ou bien rester, placer Friedrick Ulhmann en embuscade