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PRISONNIER.

l’impuissance. Par contre, étroitement ligoté par les multiples tours d’une corde solide, il n’aurait pu faire le plus petit mouvement ; un bâillon eût au besoin étouffé ses cris, un impénétrable bandeau lui enlevait l’usage de la vue.

La première sensation de Serge Ladko, en revenant à la vie, fut celle d’un véritable ahurissement. Que lui était-il arrivé ? Que signifiait cette inexplicable attaque, et que voulait-on faire de lui ? À tout prendre, il avait lieu de se rassurer dans une certaine mesure. Si l’on avait eu l’intention de le tuer, c’eût été chose faite. Puisqu’il était encore de ce monde, c’est qu’on n’en voulait pas à sa vie, et que ses agresseurs, quels qu’ils fussent, n’avaient d’autre intention que de s’emparer de sa personne.

Mais pourquoi, dans quel but s’emparer de sa personne ?

À cette question, il était malaisé de répondre. Des voleurs ?… Ils n’eussent pas pris la peine de ficeler leur victime avec un tel luxe de précautions, quand un coup de couteau les eût servis plus rapidement et plus sûrement. D’ailleurs, combien misérables les voleurs que le contenu de la pauvre barge eût été capable de tenter !

Une vengeance ?… Impossibilité plus grande encore. Ilia Brusch n’avait pas d’ennemis. Les seuls ennemis de Ladko, les Turcs, ne pouvaient soupçonner que le patriote bulgare se cachât sous le nom du pêcheur, et, quand bien même ils en