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LE PILOTE DU DANUBE.

Ladko dut revenir en arrière et retourner attendre de meilleurs jours dans la petite ville où il avait fixé sa résidence.

Les lettres de Natcha, qu’il y reçut bientôt, lui démontrèrent l’impossibilité de prendre un autre parti. Sa maison était surveillée plus que jamais, à ce point que Natcha devait se considérer comme virtuellement prisonnière ; plus que jamais on le guettait, et il lui fallait, dans l’intérêt commun, s’abstenir soigneusement de toute démarche imprudente.

Ladko rongea donc son frein dans l’inaction, les envois d’armes ayant été forcément supprimés depuis l’avortement de la révolte et la concentration des troupes turques sur les rives du fleuve. Mais cette attente, déjà pénible par elle-même, lui devint tout à fait intolérable, quand, vers la fin du mois de juin, il cessa de recevoir aucune nouvelle de sa chère Natcha.

Il ne savait que penser, et ses inquiétudes devinrent de torturantes angoisses à mesure que le temps s’écoula. Il était, en effet, en droit de tout craindre. Le 1er juillet, la Serbie avait officiellement déclaré la guerre au Sultan, et, depuis lors, la région du Danube était sillonnée de troupes, dont le passage incessant s’accompagnait des plus terribles excès. Fallait-il donc compter Natcha au nombre des victimes de ces troubles, ou bien avait-elle été incarcérée par les autorités turques, soit comme otage, soit comme complice présumée de son mari ?