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le sphinx des glaces

consolait, sans doute, à la pensée de vendre sa marchandise vingt-cinq pour cent plus cher qu’elle ne valait.

Ce qui est certain, c’est que le capitaine Len Guy ne manifesta à aucun instant l’intention de débarquer. Cela était d’autant plus singulier qu’il ne devait pas ignorer que la Jane avait relâché sur cette côte nord-ouest de Tristan d’Acunha, avant de partir pour les mers australes. Et de se mettre en relation avec le dernier Européen qui eût serré la main de son frère, cela paraissait assez indiqué…

Néanmoins, Jem West et ses hommes furent seuls à descendre à terre. Là, c’est avec la plus grande hâte qu’ils s’occupèrent de décharger le minerai d’étain et de cuivre qui formait la cargaison de la goélette, et, ensuite, d’embarquer des provisions, de remplir les caisses à eau, etc.

Tout le temps, le capitaine Len Guy demeura à bord, sans même monter sur le pont, et, par le châssis vitré de sa cabine, je le voyais incessamment courbé sur sa table.

Des cartes étaient déployées, des livres étaient ouverts. Il n’y avait pas à douter que ces cartes fussent celles des régions australes, et ces livres, ceux qui racontaient les voyages des précurseurs de la Jane dans ces mystérieuses régions de l’Antarctide.

Sur cette table s’étalait aussi un volume, cent fois lu et relu ! La plupart de ses pages étaient cornées, dont les marges portaient de multiples notes au crayon… Et, sur la couverture, brillait ce titre comme s’il eût été imprimé en lettres de feu : Aventures d’Arthur Gordon Pym.