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vers le nord.

rapportent cent cinquante francs par voyage. Aussi ne songent-ils guère à abandonner ce lucratif métier pour celui plus aléatoire de prospecteur.

En cet endroit la vitesse du courant est de cinq lieues à l’heure. Il ne faudrait donc qu’un temps très court pour descendre les trois kilomètres des rapides, si l’on n’était obligé à tant de détours entre les roches de basalte capricieusement semées entre les deux rives, — ou pour éviter les glaçons, écueils mouvants dont le choc fracasserait la plus solide embarcation, — que la durée du trajet en est extrêmement augmentée.

À plusieurs reprises, le bateau, appuyé sur les avirons, dut virer bout pour bout sous la menace d’un abordage, soit avec un glaçon, soit avec un canot, et l’habileté de Neluto le tira de plus d’un mauvais pas. Le dernier saut de ces rapides est le plus dangereux, et c’est là que se produisent de nombreuses catastrophes. Il importe de bien se tenir aux bancs, si l’on ne veut pas être jeté par-dessus bord. Mais Neluto avait l’œil juste, la main sûre, un imperturbable sang-froid, et, s’il ne put se garer de quelques paquets d’eau que l’on eut vite fait de rejeter à la rivière, le passage redoutable fut néanmoins franchi sans dommages.

« Et maintenant, s’écria Summy Skim, le plus fort est-il fait, Bill ?

— Ce n’est pas douteux, répondit Ben Raddle.

— En effet, messieurs, déclara le Scout. Il ne nous reste plus que le lac Labarge à traverser et la Lewis à suivre pendant cent soixante lieues environ…

— Cent soixante lieues ! répéta Summy Skim en riant, autant dire que nous sommes arrivés ! »

Bill Stell, d’accord avec Neluto, décida de faire une halte de vingt-quatre heures à la station du lac Labarge, qu’on atteignit dans la soirée du 10 mai. Le vent soufflait du Nord avec violence. À peine si le bateau, même à force d’avirons, eût pu gagner le large, et le pilote tenait d’autant moins à tenter la traversée dans