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du capitaine grant.

ments de gratitude qui inondaient son cœur avec tant de simplicité et de noblesse, son mâle visage était illuminé d’une émotion si pure et si douce, que tout l’équipage se sentit récompensé et au delà des épreuves subies. L’impassible major lui-même avait l’œil humide d’une larme qu’il n’était pas en son pouvoir de retenir. Quant au digne Paganel, il pleurait comme un enfant qui ne pense pas à cacher ses larmes.

Harry Grant ne se lassait pas de regarder sa fille. Il la trouvait belle, charmante ! Il le lui disait et redisait tout haut, prenant lady Helena à témoin, comme pour certifier que son amour paternel ne l’abusait pas. Puis, se tournant vers son fils :

« Comme il a grandi ! C’est un homme ! » s’écriait-il avec ravissement.

Et il prodiguait à ces deux êtres si chers les mille baisers amassés dans son cœur pendant deux ans d’absence.

Robert lui présenta successivement tous ses amis, et trouva le moyen de varier ses formules, quoiqu’il eût à dire de chacun la même chose ! C’est que, l’un comme l’autre, tout le monde avait été parfait pour les deux orphelins. Quand arriva le tour de John Mangles d’être présenté, le capitaine rougit comme une jeune fille et sa voix tremblait en répondant au père de Mary.

Lady Helena fit alors au capitaine Grant le récit du voyage, et elle le rendit fier de son fils, fier de sa fille.

Harry Grant apprit les exploits du jeune héros, et comment cet enfant avait déjà payé à lord Glenarvan une partie de la dette paternelle. Puis, à son tour, John Mangles parla de Mary en des termes tels, que Harry Grant, instruit par quelques mots de lady Helena, mit la main de sa fille dans la vaillante main du jeune capitaine, et, se tournant vers lord et lady Glenarvan :

« Mylord, et vous, madame, dit-il, bénissons nos enfants ! »

Lorsque tout fut dit et redit mille fois, Glenarvan instruisit Harry Grant de ce qui concernait Ayrton. Grant confirma les aveux du quartier-maître au sujet de son débarquement sur la côte australienne.

« C’est un homme intelligent, audacieux, ajouta-t-il, et que les passions ont jeté dans le mal. Puissent la réflexion et le repentir le ramener à des sentiments meilleurs ! »

Mais avant qu’Ayrton fût transféré à l’île Tabor, Harry Grant voulut faire à ses nouveaux amis les honneurs de son rocher. Il les invita à visiter sa maison de bois et à s’asseoir à la table du Robinson océanien.

Glenarvan et ses hôtes acceptèrent de grand cœur. Robert et Mary Grant brûlaient du désir de voir ces lieux solitaires où le capitaine les avait tant pleurés.