Page:Verne - Les grands navigateurs du XVIIIe siècle, 1879.djvu/169

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
159
SECOND VOYAGE DU CAPITAINE COOK.

vertes par Carteret, et qui n’avaient pu être confirmées par des observations astronomiques. Mais, n’ayant plus l’espoir de trouver un continent austral, il fit voile au N.-O. et ne tarda pas à reconnaître plusieurs des îles vues par Bougainville.

« Ces îles basses dont la mer du Sud est remplie entre les tropiques, dit-il, sont de niveau avec les flots dans les parties inférieures, et élevées à peine d’une verge ou deux dans les autres. Leur forme est souvent, circulaire ; elles renferment à leur centre un bassin d’eau de la mer, et la profondeur de l’eau tout autour est incommensurable. Elles produisent peu de chose ; les cocotiers sont vraisemblablement ce qu’il y a de meilleur : malgré cette stérilité, malgré leur peu d’étendue, la plupart sont habitées. Il n’est pas aisé de dire comment ces petits cantons ont pu se peupler, et il n’est pas moins difficile de déterminer d’où les îles les plus élevées de la mer du Sud ont tiré leurs habitants. »

Le 15 août, Cook reconnut l’île d’Osnabruck ou Mairea, découverte par Wallis, et fit route pour la baie d’Oaiti-Piha, où il comptait embarquer le plus de rafraîchissements possible, avant de gagner Matavaï.

« À la pointe du jour, dit Forster, nous jouîmes d’une de ces belles matinées que les poètes de toutes les nations ont essayé de peindre. Un léger souffle de vent nous apportait de la terre un parfum délicieux et ridait la surface des eaux. Les montagnes, couvertes de forêts, élevaient leurs têtes majestueuses, sur lesquelles nous apercevions déjà la lumière du soleil naissant. Très près de nous, on voyait une allée de collines, d’une pente plus douce, mais boisées comme les premières, agréablement entremêlées de teintes vertes et brunes ; au pied, une plaine parée de fertiles arbres à pain, et par derrière une quantité de palmiers, qui présidaient à ces bocages ravissants. Tout semblait dormir encore. L’aurore ne faisait que poindre, et une obscurité paisible enveloppait le paysage. Nous distinguions cependant des maisons parmi les arbres et des pirogues sur la côte. À un demi-mille du rivage, les vagues mugissaient contre un banc de rochers de niveau avec la mer, et rien n’égalait la tranquillité des flots dans l’intérieur du havre. L’astre du jour commençait à éclairer la plaine ; les insulaires se levaient et animaient peu à peu cette scène charmante. À la vue de nos vaisseaux, plusieurs se hâtèrent de lancer leurs pirogues et ramèrent près de nous, qui avions tant de joie à les contempler. Nous ne pensions guère que nous allions courir le plus grand danger et que la destruction menacerait bientôt les vaisseaux et les équipages sur les bords de cette rive fortunée. »

L’habile écrivain, l’heureux peintre, qui sait trouver des couleurs si fraîches et si variées ! Peu d’expressions ont vieilli dans ce tableau enchanteur. On