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LES GRANDS NAVIGATEURS DU XVIIIe SIÈCLE.

qu’on se proposait était manqué, si au point de vue géographique, aucune découverte, aucune observation nouvelle n’avait été faite, Cuvier, dans son éloge d’Olivier, assure qu’en ce qui regarde l’histoire naturelle, les renseignements obtenus ne manquaient pas de valeur. Il faut bien le croire, puisque, trois mois après son retour, Olivier était nommé de l’Institut en remplacement de Daubenton.

Quant à sa relation, publiée en trois volumes in-4o, elle reçut du public l’accueil le plus distingué, dit Cuvier en style académique.

« On a dit qu’elle aurait été plus piquante, continue-t-il, si la censure n’en eût rien retranché ; mais alors on trouvait des allusions partout, et il n’était pas toujours permis de dire ce que l’on pensait, même sur Thamas-Kouli-Khan.

« M. Olivier ne tenait pas à ses allusions plus qu’à sa fortune ; il effaça tranquillement tout ce qu’on voulut, et se restreignit, avec une entière soumission, au récit pur et simple de ce qu’il avait observé. »

De la Perse à la Russie, la transition n’est pas trop brusque. Elle l’était encore bien moins au xviiie siècle qu’aujourd’hui. À proprement parler, ce n’est qu’avec Pierre le Grand que la Russie entre dans le concert européen. Jusqu’alors, cette contrée, par son histoire, par ses relations, par les mœurs de ses habitants, était demeurée tout asiatique. Avec Pierre le Grand, avec Catherine II, les routes se percent, le commerce prend de l’importance, la marine se crée, les tribus russes se réunissent en corps de nation. Déjà, l’empire soumis au czar est immense. Ses souverains, par leurs conquêtes, l’agrandissent encore. Ils font plus. Pierre le Grand dresse des cartes, envoie des expéditions de tous les côtés pour être renseigné sur le climat, les productions, les races de chacune de ses provinces ; enfin, il expédie Behring à la découverte du détroit qui doit porter le nom de ce navigateur.

Catherine II marche sur les traces du grand empereur, de l’initiateur par excellence. Elle attire des savants en Russie, se met en relation avec les littérateurs du monde entier. Elle sait créer une puissante agitation en faveur de son peuple. La curiosité, l’intérêt s’éveillent, et l’Europe occidentale a les yeux fixés sur la Russie. On sent qu’une grande nation est à la veille d’être constituée, et l’on n’est pas sans inquiétude sur les suites qu’amènera, infailliblement, son entremise dans les affaires européennes. Déjà la Prusse vient de se révéler, et son épée, jetée par Frédéric II dans la balance, a changé toutes les conditions de l’équilibre européen. La Russie possède bien d’autres ressources en hommes, en argent, en richesses de tout genre inconnues ou inexploitées.

Aussi, toutes les publications relatives à cette contrée sont-elles aussitôt lues