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mistress branican.

nican, elle se donnait tout entière à l’œuvre de Wat-House pour les enfants abandonnés.

Maintenant, une cinquantaine de pauvres êtres, les uns tout petits, les autres déjà grandelets, étaient élevés dans cet hospice, où Mrs. Branican les visitait chaque jour, s’occupant de leur santé, de leur instruction et aussi de leur avenir. La somme considérable affectée à l’entretien de Wat-House permettait de les rendre heureux autant que peuvent l’être des enfants sans père ni mère. Lorsqu’ils étaient arrivés à l’âge où l’on entre en apprentissage, Dolly les plaçait dans les ateliers, les maisons de commerce et les chantiers de San-Diégo, où elle continuait de veiller sur eux. Cette année-là, trois ou quatre fils de marins purent même s’embarquer sous le commandement d’honnêtes capitaines dont on était sûr. Partis mousses, ils passeraient novices entre treize et dix-huit ans, puis matelots, puis maîtres, assurés ainsi d’un bon métier pour leur âge mûr et d’une retraite pour leurs vieux jours. Et cela fut constaté par la suite, l’hospice de Wat-House était destiné à constituer la pépinière de ces marins qui font honneur à la population de San-Diégo et autres ports de la Californie.

En outre de ces occupations, Mrs. Branican ne cessait d’être la bienfaitrice des pauvres gens. Pas un ne frappait en vain à la porte de Prospect-House. Avec les revenus considérables de sa fortune, administrée par les soins de M. William Andrew, elle concourait à toutes ces bonnes œuvres, dont les familles des matelots du Franklin avaient la plus importante part. Et, de ces absents, n’espérait-elle pas que quelques-uns reviendraient un jour ?

C’était l’unique sujet de ses entretiens avec Zach Fren. Quel avait été le sort des naufragés dont on n’avait point retrouvé trace sur l’île Browse ?… Pourquoi ne l’auraient-ils pas quittée sur une embarcation construite par eux, quoi qu’en eût dit le capitaine Ellis ?… Il est vrai, tant d’années s’étaient écoulées déjà, que c’était folie d’espérer encore !

La nuit surtout, au sein d’un sommeil agité par d’étranges rêves,