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mistress branican.

liens ont voulu l’accommoder pour leur repas du soir. Il n’y avait qu’à les laisser faire.

Voici comment ils s’y prennent :

Un trou ayant été creusé dans le sable, un indigène y place des pierres préalablement chauffées au milieu d’un brasier, et sur lesquelles sont étendues des feuilles odorantes. Le serpent, dont la tête et la queue ont été coupées, est exposé au fond du trou et recouvert du même feuillage, qui est maintenu par des pierres chaudes. Le tout reçoit une couche de terre piétinée, assez épaisse pour que la vapeur de la cuisson ne puisse s’échapper au dehors.

Nous assistons à cette opération culinaire, non sans quelque dégoût ; mais, lorsque le serpent, suffisamment cuit, a été retiré de ce four improvisé, il faut convenir que sa chair exhale un fumet délicieux. Ni Jane ni moi, n’en voulûmes goûter, bien que Tom Marix assurât que, si la chair blanchâtre de ces reptiles est assez insipide, leur foie est considéré comme un manger des plus savoureux.

« On peut le comparer, dit-il, à ce qu’il y a de plus fin en fait de gibier et particulièrement à la gélinotte.

— Gélinotte !… Bien !… Oh !… Très bien ! Délicieux, la gélinotte ! » s’écria Jos Meritt.

Et après s’être fait servir un petit morceau du foie, il en redemanda un plus gros, et il eût fini par le dévorer tout entier. Que voulez-vous ? Le sans-façon britannique.

Quant à Gîn-Ghi, il ne s’est pas fait prier. Une belle tranche fumante de la chair du serpent, qu’il a dégustée en gourmet, l’a mis de belle humeur.

« Ai ya ! s’est-il écrié non sans un long soupir de regret, avec quelques huîtres de Ning-Po et une fiole de vin de Tao-Ching, on se croirait au Tié-Coung-Yuan ! »

Et Gîn-Ghi voulut bien m’apprendre que c’était là le fameux débit de thé de l’Arc de fer à Pékin.

Godfrey et Zach Fren, surmontant leur répugnance, s’offrirent