Page:Vernet - La nouvelle équipe, 1930.pdf/66

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
60
LA NOUVELLE ÉQUIPE

— Maurice Bournef, cria-t-on d’un groupe, venez un peu avec nous.

Maurice s’approcha. Il aperçut là, parmi des visages inconnus, deux instituteurs qu’il connaissait bien, et près d’eux, un professeur de mathématiques retraité, une belle figure, et l’une des plus claires intelligences de l’heure. Charles Laurent, depuis sa retraite, se donnait aux problèmes de l’éducation, y déployant une activité surprenante pour un homme de son âge.

— Eh bien, Bournef, que pensez-vous de la situation ?

— Pour pouvoir penser quelque chose de précis, répondit gravement Maurice, il faudrait avoir des données assez nettes, ou même seulement vraisemblables. Mais il ne m’apparaît pas que nous en possédions.

— Moi, dit le second instituteur, je ne suis pas de cet avis. La situation est nette. Ou nous serons attaqués, et alors nous marchons, sans arrière pensée, pour défendre notre liberté contre le militarisme allemand ; ou nous ne serons pas attaqués, et comme ce n’est sûrement pas nous qui déclarerons la guerre, nous ne risquons rien à répondre à la mobilisation.

Un murmure approbateur répondit à cette déclaration.

— Cependant, fit observer Maurice, la mobilisation, par elle-même, est un danger. Elle indique que nous acceptons l’idée de la guerre.

— Mais mon cher Bournef, dit à son tour le vieux mathématicien, comment voulez-vous qu’on fasse autrement ? Il est trop clair qu’une partie de l’Europe est en guerre. Nous devons nous mettre sur la défensive. L’imprévoyance serait un crime à l’égard de notre pays. Du reste je partage l’avis de Lormont, et je suis fermement assuré que la France n’attaquera pas. Mais si on l’attaque, elle doit défendre sa liberté.