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LA NOUVELLE ÉQUIPE

— Voici ce qu’on pourrait faire, proposa-t-elle. Je vais partir seule, mon ami. Éliane te fera bien un lit ici. Et je viendrai te rejoindre demain matin. Puisque maman va rester à la maison, je peux toujours compter sur elle pour les enfants.

Louise, à son tour, soumit une proposition :

— Partons ensemble Jeanne. Que Léon et Maurice restent ici tous les deux, cela coupera court à toute discussion possible entre eux et le général. Il est bien inutile d’aggraver encore ces heures pénibles.

— Alors, partons au plus vite Louise, car les trains sont limités à Saint-Lazare.

Après de rapides adieux, les deux femmes quittèrent l’appartement du peintre, accompagnées par Léon et Maurice qui voulaient au moins les escorter jusqu’à la gare.

— Avec le vent qui souffle ce soir à Paris, dit Léon, nous ne serions pas tranquilles de vous savoir seules dans les rues.

Et Maurice ajouta :

— Quand la violence est déchaînée, nul ne peut prédire jusqu’à quelles extravagances elle se laissera emporter.


X


Maurice ne croyait pas si bien dire. En cette nuit du 2 au 3 août 1914, Paris fut le théâtre de scènes de pillages inouïes. Tous les dépôts de lait de la Société Maggi furent pris d’assaut par des bandes d’énergumènes et complètement dévastés. Une légende avait pris corps assez tard dans la soirée, et s’était colportée très rapidement. Maggi y était représenté comme un suisse allemand, espion, payé par l’Allemagne. Tout le lait des dépôts qui allait être livré le matin même de-