Page:Vianey - Les Sources de Leconte de Lisle, 1907.djvu/205

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De l’argile terrestre et du feu primitif,
Du fruit des fruits, de l’air et des tiges de l’if ;
Des joncs du lac tranquille et des fleurs de l’arbuste,
Et de l’ortie aiguë et du chêne robuste.
Le Purificateur m’a brûlé sur l’autel,
Et j’ai connu la mort avant d’être immortel,
Et dans l’aube et la nuit j’ai fait les trois Voyages,
Marqué du triple sceau par le Sage des sages.
Or, serpent tacheté, j’ai rampé sur les monts ;
Crabe, j’ai fait mon nid dans les verts goémons ;
Pasteur, j’ai vu mes bœufs paître dans les vallées.
Tandis que je lisais aux tentes étoilées ;
J’ai fui vers le couchant ; j’ai prié, combattu ;
J’ai gravi d’astre en astre et de vice en vertu,
Emportant le fardeau des angoisses utiles ;
J’ai vu cent continents, j’ai dormi dans cent îles,
Et voici que je suis plein d’innombrables jours,
Devant grandir sans cesse et m’élever toujours !
Que dit enepr la Voix à la race du Chêne ?
Voici ce qu’elle dit : La flamme au feu s’enchaîne,
Et l’échelle sans fin, sur son double versant,
Voit tout ce qui gravit et tout ce qui descend
Vers la paix lumineuse ou dans la nuit immense,
Et l’un pouvant déchoir quand l’autre recommence.


Cette page, sauf deux ou trois expressions dont l’origine m’échappe, est traduite librement de diverses phrases du Kad Goddeu, poème symbolique attribué à Taliésin. Le poète avait trouvé ces phrases traduites en français dans une note de l’Histoire de France d’Henri Martin[1] :

Existant de toute ancienneté dans les océans, depuis le jour


  1. Quatrième édition, t. I, p. 76. note 3.