Page:Vianey - Les Sources de Leconte de Lisle, 1907.djvu/24

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cription où l’on reconnaît sans peine un des modèles d’après lesquels Leconte de Lisle a peint en divers endroits la forêt indienne, exubérante de vie :


Dans le bois repairent les tigres, qui déchirent les hommes, conduits par le sort dans leur voisinage : on est, à cause d’eux, en des transes continuelles ; ce qui fait du bois, mon amie, une chose affreuse !

Dans le bois circulent de nombreux éléphants, aux joues inondées par la sueur ; ils vous attaquent et vous tuent ; ce qui fait du bois, mon amie, une chose affreuse !

On y trouve les deux points extrêmes de la chaleur et du froid, la faim et la soif, les dangers sous mille formes ; ce qui fait du bois, mon amie, une chose affreuse !

Les serpents et toutes les espèces de reptiles errent dans la forêt impénétrable au milieu des scorpions aux subtils venins ; ce qui fait du bois, mon amie, une chose affreuse !

Dans le bois, on entend les rugissements épouvantables des lions, hôtes accoutumés des grandes forêts et nés dans les cavernes des montagnes…

Il faut traverser là des fleuves, dont l’approche est difficile, profonds, larges, vaseux, infestés par de longs crocodiles.

Les chemins, tout couverts de roseaux, de broussailles, de lianes, de hautes herbes et d’épines, embarrassent le pas et la marche : aussi la forêt, Sita, n’est-elle partout que peine[1].


Rien n’ébranle la résolution de Sita. Que lui importent les tristesses de la forêt ! Elles n’existeront point pour elle. Si elle est avec son Rama, les épines des bois lui seront douces au toucher comme la soie, et son lit formé de

feuilles lui semblera chaud comme la plus fine peau de

  1. Ramayana, traduction Fauche, t. II , p. 165-166.