Page:Viard - Grandes chroniques de France - Tome 8.djvu/174

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rieres et a engins, dont il y furent dommagié et y firent grant domage, et lessierent avoir à ceulz de la cité moult pou de repos ; pour laquelle chose il furent moult durement espoenté. Et lors firent transporter en Chypre, par la navie, les tresors de la cité avec les merceries et les saintes reliques, les vielz hommes et les vielles femmes et les petiz enfanz, et touz ceulz qui à bataillier n’avoient mestier. Et moult en y ot que quant il s’apperçurent qu’il y avoit discorde et contenz entre eulz, de la cité si s’en departirent tant à pié comme à cheval avec touz leurs biens que avec eulz emporterent. Et ainsi ne demourerent en la cité d’Acre que xiim hommes ou environ ; desquielz il en y avoit vc à cheval et le demourant à pié, nobles batailleurs.

Adonques au xv jour du moys de may, les maistres des Sarrazins donnerent a grant empointe i grant assaut à ceus qui gardoient les murs et les deffenses de la cité, que à par i pou que les gardes au roy de Chypre[1] ottroiant, se la nuit très oscure ne fust venue, et une empointe d’aucune deffense ne fust venue d’autre part, ne les eust secouruz, certainement les adversaires fussent entrez en la cité. Adonc en celle nuit, le roy de Chipre bailla sa garde à deffendre au menistre de la chevalerie des Tyois[2]. Et si comme il disoit qu’il devoit revenir l’endemain au matin prochain avec touz les siens, et à par i pou avec iiim d’autres, s’enfui par mer laidement et vilainement. Et lors, l’endemain, les Sarrazins venans de toutes pars pour la cité assaillir, quant il virent pou de deffendeurs

  1. Henri II de Lusignan, roi de Chypre, après Jean Ier de 1285 à 1324.
  2. Burcard.