Page:Viau - Œuvres complètes, Jannet, 1856, tome 1.djvu/324

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Cloris, que ton pouvoir est grand !
La fureur de l’onde se rend
À la faveur que tu m’as faicte.
Que je vay passer doucement,
Et que la peur de la tempeste
Me donne peu de pensement !

L’ancre est levée, et le zephire,
Avec un mouvement leger,
Enfle la voile et faict nager
Le lourd fardeau de la navire.
Mais quoy ! le temps n’est plus si beau,
La tourmente revient dans l’eau !
Dieux, que la mer est infidelle !
Chere Cloris, si ton amour
N’avoit plus de constance qu’elle,
Je mourrois avant mon retour.



À CLORIS.

ODE.


Aussi franc d’amour que d’envie,
Je vivois, loing de vos beautez,
Dans les plus douces libertez
Que la raison donne à la vie.
Mais les regards imperieux
Qu’Amour tire de vos beaux yeux
M’ont bien faict changer de nature.
Ha : que les violens desirs
Que me donna ceste advanture
Furent traistres à mes plaisirs !

     Le doux esclat de ce visage,
Que paroissoit sans cruauté,