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Ah ! j’oubliais encore de dire que Baucis chante admirablement les airs de ces temps préhistoriques : on dirait du plain-chant.

Étrange ![1]

  1. Il est évident que l’intelligence et la mémoire des bêtes sont tout à fait extraordinaires ; pour vous en convaincre, lisez d’abord cette note curieuse d’Henri de Parville :

    La brave bête, que le chien, et quelle intelligence ! Lisez l’histoire suivante que raconte M. le professeur Forel, de Morges, Suisse :

    Il nous fait remarquer l’acte d’intelligence réfléchie qui a guidé deux pauvres chiens à la recherche de secours pour leur maître et nous signale comme particulièrement digne d’admiration le concert de ces deux animaux, qui ont dû délibérer et se mettre d’accord sur la conduite à tenir, dans la grave conjecture qui les tourmentait :

    « Il y a quelques jours. le gardien de l’hôtel de Z’meiden, au-dessus de Tourtewagne, dans le district valaisien de Loèche. était sorti de la maison pour couper du bois. Il avait passé là tout l’hiver, seul, avec deux chiens, ses deux braves et fidèles compagnons de solitude, un chien-loup et un griffon, plus petit de taille, mais adroit et intelligent. Comme le maitre coupait son bois au pied d’un petit mur et non loin du grand toit qui couvre l’hôtel, la couche de neige amoncelée sur le toit glissa inopinément, atteignit l’homme, le colla au mur et l’emprisonna jusque par-dessus les épaules, la tète seule sortant de l’avalanche. La neige était humide, lourde, glacée. Impossible au malheureux de remuer bras ni jambes. Les chiens virent leur maître dans ce cas. Ils s’approchèrent et essayèrent de gratter la neige pour le délivrer. Vaine tentative ! Alors, ils se concertent. Et, tout à coup rapides comme la flèche, ils s’élancent vers le bas de la vallée. Là-bas, à Ems, habite le frère de leur maitre. Ils lui diront le malheur qui est arrivé et le supplieront de monter au secours de leur ami qui va périr?

    « Ventre à terre, en carrière, ils courent sur la neige. Le trajet est de quatre heures pour un bon marcheur. En moins d’une heure ils l’ont parcouru. C’est vers midi que l’avalanche est tombée. Avant une heure, ils jappaient, aboyaient, pleuraient, hurlaient, devant la maison dont le salut devait sortir. On ouvre la porte du chalet. On veut faire entrer les deux chiens, trempés de sueur, fumants. Ils refusent. Ils redoublent leurs aboiements. On leur offre à manger. Ils refusent… Alors on s’inquiète. Qu’ont-elles, les braves bêtes, à pleurer ainsi ? Serait-il arrivé malheur là-haut, à l’hôtel, au frère ? Vite le paysan met sa veste et ses guêtres et se munit d’une pelle et d’une corde. Il va quérir des amis, former une colonne de secours. Les chiens le précèdent : leurs aboiements, sinistres tout à l’heure, quand ils annonçaient la fatale nouvelle, ont changé de nature. Ce sont des cris d’appel, maintenant, et d’encouragement.