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SIX ANS AUX MONTAGNES ROCHEUSES

plus de cinq ans. À peine installé, mon premier soin fut de visiter mes paroissiens, en commençant par la vallée de Frenchtown. Chaque jour après le dîner, je partais en traîneau avec Polyte, qui me servait de guide. Nous allions ainsi de maison en maison  ; j’inscrivais soigneusement les noms des parents et de leurs nombreux enfants. Inutile de dire que je fus parfaitement reçu dans ces excellentes familles canadiennes. On m’invitait partout à revenir souvent et à m’asseoir à la table commune. Je fus frappé dans ces visites de l’air d’aisance qui régnait partout. La maison d’habitation, la résidence, comme on dit par là, se distingue des autres bâtiments qui l’entourent, par son extrême propreté. D’ordinaire la porte d’entrée s’ouvre sur une grande chambre qui sert de salon de réception et où se font les veillées en hiver. Les autres bâtiments de la ferme, au nombre de huit ou dix, environnent la résidence : grainerie, laiterie, glacière, boucherie, etc. Il n’y a point d’étables : les vaches paissent en liberté et en troupes comme les chevaux. Une ferme complète ressemble à un petit village.

Je visitai une à une toutes les maisons sur une longueur de 21 kilomètres, et trouvai ainsi une centaine de familles  ; puis je m’acheminai vers les postes les plus éloignés de la paroisse. Cette fois, laissant à la maison cheval et voiture, je prenais le train.

À l’extrémité Ouest de la vallée de Frenchtown, la rivière Missoula s’engage dans un étroit défilé de montagne, où d’ordinaire il n’y a de place que pour elle et pour la ligne du chemin de fer. La première station est Lothrop, à 20 kilomètres de Frenchtown. Ce village se groupe autour d’une immense scierie qui exploite les forêts voisines, surtout pour fournir le bois nécessaire aux mines de la région. Les premières fois que je m’ar-