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LIVRE II. — CHAPITRE V.

dit aussi que, tant qu’il vécut, l’Académie ne manqua pas de défenseurs. Toutefois nous n’avons sur l’ouvrage ou les ouvrages que Philon put écrire à ce moment aucun renseignement précis.


III. Pour Philon comme pour ses prédécesseurs dans l’Académie, comme pour tous les philosophes de son temps, le problème capital fut celui de la certitude.

À en croire la plupart des historiens, Philon se serait rallié à une sorte de dogmatisme mitigé ; il aurait reculé en arrière de Carnéade, et incliné déjà vers ce dogmatisme éclectique qui devait triompher avec Antiochus.

Nombre de témoignages en effet s’accordent à établir qu’il a modifié l’enseignement de la nouvelle Académie. On a vu qu’il fut considéré comme le fondateur d’une quatrième Académie ; et Cicéron nous dit en propres termes qu’il introduisit des nouveautés[1]. Ces nouveautés devaient être de quelque importance, puisque, lisant à Alexandrie deux livres que Philon venait de publier à Rome, son disciple Antiochus, le plus doux des hommes, entra dans une grande colère : faisant appel aux souvenirs de ceux qui avaient avec lui suivi les leçons de Philon, il leur demanda si jamais pareilles choses avaient été entendues dans l’Académie. Enfin, il composa lui-même un traité pour réfuter son maître.

Nul doute encore que Philon n’ait professé une sorte de dogmatisme. On nous dit[2] en effet qu’il faisait remonter jusqu’à Platon la doctrine de la nouvelle Académie ; il se flattait d’être le continuateur du maître d’Aristote, disait qu’il n’y avait jamais eu qu’une seule Académie, et s’élevait contre ceux qui soutenaient le contraire.

Numénius[3] nous apprend aussi que dans sa joie de succéder à Clitomaque, il était, avec une ardeur toute nouvelle, parti en guerre contre les stoïciens. Mais plus tard l’expérience calma

  1. Ac., II, vi, 18 : « Philo autem, dum nova quædam commovet. »
  2. Cic., Ac., I, iv, 13.
  3. Ap. Euseb., Præp. ev. XIV, ix, 1.