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ÆNÉSIDÈME.

CHAPITRE II.

ÆNÉSIDÈME.


Ænésidème[1] est avec Pyrrhon le plus illustre représentant du scepticisme dans l’antiquité. Entre ces deux hommes, les différences sont nombreuses. Pyrrhon, on l’a vu, est surtout un moraliste, et dédaigne la dialectique. Nous ne savons presque rien des idées d’Ænésidème sur la morale ; en revanche, nous sommes sûrs qu’il a été un dialecticien subtil et profond ; c’est lui qui a donné au pyrrhonisme une forme philosophique et scientifique ; le scepticisme lui doit ses arguments les plus forts et les plus redoutables ; il a mérité d’être comparé à Hume et à Kant.

Nous connaissons mal les idées de Pyrrhon, mais nous avons d’assez nombreux détails sur sa vie et son caractère. C’est l’inverse pour Ænésidème. Ses doctrines sont connues incomplètement, mais d’une manière précise et très sûre ; nous ne savons presque rien de sa vie, et rien de sa personne ; ses pensées seules ont survécu. Il semble que la malignité du sort ait pris plaisir à multiplier les contradictions au sujet de ce personnage qui voyait des contradictions partout. Il est impossible de concilier les renseignements qui nous sont parvenus sur la date de sa vie. On le compte d’ordinaire parmi les nouveaux sceptiques ; mais il y a de fortes raisons de le ranger parmi les anciens. Des

  1. Nous avons consulté sur Ænésidème : Ravaisson, Essai sur la Métaphysique d’Aristote, t. II, p. 251 ; Saisset, Le scepticisme (Paris, Didier, 2e édit. 1865) ; Maccoll, The Greek Sceptics, from Pyrrho to Sextus (London, Macmillan, 1869) Haas, De philosophorum scepticorum successionibus (Wirceburg., Stuber, 1875) Natorp, Forsch. zur Geschichte des Erkenntnissproblems im Altertum (Berlin, 1884) ; Diels, Doxogr. Græci, p. 210, Berlin, Reimer, 1879 ; R. Hirzel, Untersuchungen über Cicero’s Schriften, iii. Th., p. 64 et seq. Leipzig, Hirzel, 1883.