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LIVRE III. — CHAPITRE V.

ticisme était à lui-même sa propre fin, à moins qu’il ne fût un acheminement à un nouveau dogmatisme ; pour ses successeurs, il est le vestibule de la médecine. Si Ænésidème soustrait quelque proposition au doute universel, c’est, on l’a vu, une thèse métaphysique et transcendante : l’identité des contraires dans l’absolu. Si les sceptiques ultérieurs croient à quelque chose, c’est uniquement aux successions empiriques des phénomènes telles que l’observation en dehors de toute théorie peut les découvrir. Peut-être pourrait-on ajouter que, si Ænésidème tirait de son scepticisme une conséquence pratique, c’était uniquement un précepte de morale ; les sceptiques ultérieurs paraissent avoir préféré les biens du corps à ceux de l’âme : ils ne songent à ruiner la science spéculative que pour faire place à la science positive ou, comme ils disent, à l’art. Ænésidème est encore un métaphysicien ; ses successeurs, sur lesquels, tous les historiens le reconnaissent, il n’exerça que peu d’influence, ne sont plus que des positivistes. Ils invoquent son autorité à peu près comme Aug. Comte invoque celle de Kant. Mais c’est là un point important sur lequel il faudra revenir dans la suite de ce travail.