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CHAPITRE DEUXIÈME


LES INFLUENCES DU DEHORS


LA MÉDITERRANÉE


I. FUSION NÉCESSAIRE DES CIVILISATIONS. || H. RELATIONS AVEC LA MÉDITERRANÉE. || III. LE MONDE MÉDITERRANÉEN. || IV. CONTACT DE LA FRANCE AVEC LA MÉDITERRANÉE. || V. LE COMMERCE DE L’ÉTAIN EN GAULE. || VI. LE BASSIN DE LA VILAINE. || VII. CONTRÉES INTERMÉDIAIRES ENTRE LE SUD ET LE NORD DE L’EUROPE. || VIII. LA MÉDITERRANÉE DANS NOTRE HISTOIRE.



I FUSION NÉCESSAIRE DES CIVILISATIONS

IL N’EST GUÈRE de question plus importante pour la géographie politique que de chercher comment, quand et par quelles voies une vie générale parvient à s’introduire à travers la diversité des pays locaux. Aucune étape n’est plus décisive et ne met plus de différences entre les contrées. Il y en a qui ne la franchissent pas. Elles restent morcelées à l’état de petits groupes que relie un lien très lâche, ou qui même sont à peu près isolés. Thucydide remarquait que de son temps la moitié de la Grèce, dans les montagnes et dans l’Ouest, n’était pas sortie de cet état social rudimentaire : on ne serait pas en peine encore de nos jours de citer des exemples pareils, sur les bords mêmes de la Méditerranée : l’Albanie, le Rif marocain nous montrent des types à peu près intacts de sociétés primitives. La tribu, le clan, le pays, le village sont, suivant les lieux, les cadres de cette vie. L’Afrique centrale ne nous a-t-elle pas révélé récemment, sur des étendues énormes, un état de dispersion politique à travers lequel nous voyons, aujourd’hui seulement, filtrer, avec l’Européen ou l’Arabe, les premiers filets de relations générales ?

Telle est, en effet, la marche naturelle. Le choc vient du dehors. Aucune contrée civilisée n’est l’artisan exclusif de sa propre civilisation. Ou du moins elle ne peut engendrer qu’une civilisation bornée, comme une horloge qui, après quelque temps de marche, s’arrête court. Il faut, pour qu’elle