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particulier des mouvements humains, embrasse des étendues d’autant plus considérables que la limite la plus difficile à franchir, celle de la mer, est plus éloignée. La juxtaposition en Europe des races germaniques et slaves, les invasions turques et mongoles, l’extension de la civilisation chinoise, sont par excellence des faits continentaux. Une complexité plus grande règne dans les choses. Lorsqu’on cherche à approfondir, on s’aperçoit qu’une même teinte de civilisation ou de langue couvre des éléments ethniques très différents, et qui n’ont nullement, sous l’étiquette qui les dissimule, abjuré leurs différences.


II EN QUOI LA FRANCE SE MONTRE-T-ELLE CONTINENTALE ?

Engagée, bien que moins profondément que la Germanie et la Russie, dans la masse continentale, la France tire de cette tire de cette position les éléments essentiels qui composent chez elle la nature vivante. Elle est à cet égard un morceau d’Europe. Par sa végétation, par sa composition ethnique et par les traces primitives de civilisation, elle sert de prolongement à des phénomènes qui ont eu pour se développer un champ considérable d’étendue. Son rôle, comme nous verrons, est de les résumer.

Les influences continentales auxquelles la France est soumise ne forment pas un seul tout. Elles l’ont assiégée de divers côtés, elles proviennent de centres d’action très différents. On peut dire qu’il y a, pour nous, contiguïté continentale au Sud et à l’Est.


§ I.


CONTIGUITE CONTINENTALE AU SUD

Les anciens qui visitaient la Gaule étaient frappés, aux approches de la Garonne, de changements dans le type, la langue, les mœurs des habitants ; ils traduisaient cette impression en disant que les Aquitains tenaient des Ibères plus que des Gaulois. Plus de vingt siècles ont contribué à amortir ces différences ; cependant elles ne laissent pas de se manifester encore à l’observateur, et les recherches, si incomplètes qu’elles soient encore, de l’anthropologie, confirment cette impression. Elles nous montrent en outre que ces analogies remontent aux temps préhistoriques, bien au delà de l’époque déjà avancée où un nom commun, celui d’Ibères, était parvenu à s’établir sur la péninsule.

Au Nord des Pyrénées, vers l’Ouest comme vers l’Est, la composition du monde végétal garde une empreinte ibérique ; car il n’est pas douteux que ce soit en Espagne qu’il convient de placer le centre de formation où se sont multipliés, pour rayonner en sens divers, les genres d’ulex, cistes, thyms, génistées, etc., dont les espèces s’avancent vers le Rhône et vers la Loire.

D’autre part, dès le Périgord on se trouve en présence de groupes