Page:Vidocq - Mémoires - Tome 1.djvu/247

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qui avaient quelque argent étaient nécessairement ménagés ; mais c’était le petit nombre, le long séjour de la plupart des condamnés dans les prisons ayant épuisé leurs faibles ressources.

Ces abus n’étaient pas les seuls qu’on eût à signaler dans la conduite de la chaîne. Pour économiser à son profit les frais de transport, le capitaine faisait presque toujours voyager à pied un des cordons. Or, ce cordon était toujours celui des plus robustes, c’est-à-dire des plus turbulents des condamnés ; malheur aux femmes qu’ils rencontraient, aux boutiques qui se trouvaient sur leur passage ! les femmes étaient houspillées de la manière la plus brutale ; quant aux boutiques, elles se trouvaient dévalisées en un clin d’œil, comme je le vis faire, à Morlaix, chez un épicier, qui ne conserva ni un pain de sucre ni une livre de savon. On demandera peut-être ce que faisaient les gardiens, pendant que se commettait le délit ? Les gardiens faisaient les empressés, sans apporter aucun obstacle réel, bien persuadés qu’en définitive ils profitaient du vol, puisque c’était à eux que les forçats devaient s’adresser pour vendre leur capture, ou l’échanger contre des liqueurs fortes. Il en était de même pour les spoliations exercées sur les