Page:Vidocq - Mémoires - Tome 2.djvu/129

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de tir, il y pose une main : soudain il jette un cri de terreur que répètent tous les échos du rivage ; ses doigts se sont aplatis sous vingt quintaux de bronze ; on s’efforce de les dégager, la masse qui les comprime ne pèse plus sur eux, qu’il se sent encore retenu ; il s’évanouit, quelques gouttes de chenaps me servent à le ranimer, et je m’offre à le ramener au camp ; sans doute on crut que c’était un prétexte pour m’éloigner.

» Le caporal et moi nous cheminions ensemble : au moment d’entrer dans le parc, que nous devions traverser, une fusée incendiaire tombe entre deux caissons pleins de poudre ; le péril est imminent ; quelques secondes encore, le parc va sauter. En gagnant au large, je puis trouver un abri ; mais je ne sais quel changement s’est opéré en moi, la mort n’a plus rien qui m’effraye ; plus prompt que l’éclair, je m’élance sur le tube de métal, d’où s’échappent le bitume et la roche enflammés : je veux étouffer le projectile, mais, ne pouvant y parvenir, je le saisis, l’emporte au loin, et le dépose à terre, dans l’instant même où les grenades qu’il renferme éclatent et déchirent la tôle avec fracas.