Page:Vidocq - Mémoires - Tome 2.djvu/406

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J’en étais à ma seconde séance ; aux aguets comme la veille, j’attendais avec impatience l’arrivée de quelque Ésope femelle : il ne venait pas de jeunes filles, bonnes ou grisettes à la figure dégagée, à la taille svelte, au gentil corsage, pas une d’elles qui ne fût droite comme un I ; j’en étais au désespoir… Enfin mon astre paraît à l’horizon ; c’est le prototype, la Vénus des bossues. Dieu ! qu’elle était jolie, et que la partie la plus sensible de son signalement était admirablement tournée ; je ne me lassais point de contempler cette saillie que les naturalistes auraient dû, je crois, prendre en considération, pour compter une race de plus dans l’espèce humaine ; il me semblait voir une de ces fées du Moyen Âge, pour lesquelles une difformité était un charme de plus. Cet être surnaturel, ou plutôt extra-naturel, s’approcha de la laitière, et après avoir causé quelque temps, comme je m’y étais attendu, elle prit sa crème ; c’était du moins ce qu’elle demandait ; ensuite elle entra chez l’épicier, puis elle s’arrêta un moment vers la tripière, qui lui donna du mou, probablement pour son chat ; puis, ses emplettes terminées, elle enfila, dans la rue du Petit-Carreau, l’allée d’une maison dont le rez-de-chaussée était occupé