Page:Vidocq - Mémoires - Tome 3.djvu/18

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Bicêtre, soit à la Force, il ne se passait pas de jour que je ne visse arriver quelques-uns de ces messieurs, et que je ne les entendisse se reprocher réciproquement leur turpitude. Du matin au soir, ces mouchards surnuméraires étaient à se quereller, et ce furent leurs ignobles débats qui me révélèrent combien le métier que j’allais embrasser était périlleux. Cependant je ne désespérais pas d’échapper aux dangers de la profession, et toutes les mésaventures dont j’étais le témoin étaient autant d’expériences d’après lesquelles je me prescrivais des règles de conduite, qui devaient rendre mon sort moins précaire que celui de mes devanciers.

Dans le second volume de ces Mémoires, j’ai parlé du juif Gaffré, sous les ordres de qui je fus en quelque sorte placé au moment de mon entrée à la police. Gaffré était alors le seul agent salarié. Je ne lui fus pas plus tôt adjoint, qu’il eut la fantaisie de se défaire de moi ; je feignis de ne pas pressentir son intention, et, s’il se proposait de me perdre, de mon côté je méditais de déjouer ses projets. J’avais affaire à forte partie, Gaffré était retors. Quand je le connus, on le citait comme le doyen des voleurs ; il avait commencé à huit ans, et