Page:Vidocq - Mémoires - Tome 3.djvu/20

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pu vivre sans travailler ; mais les gens de la caste de Gaffré sont laborieux, et bien qu’il fût assez largement rétribué par la police, il ne cessait pas d’ajouter à ses appointements le produit de quelques aubaines illicites, ce qui ne l’empêchait pas d’être fort considéré dans son quartier (alors le quartier Martin) où, ainsi que son acolyte Francfort, autre juif, il avait été nommé capitaine de la garde nationale.

Gaffré craignait que je ne le supplantasse ; mais le vieux renard n’était pas assez habile pour me cacher ses appréhensions : je l’observai, et ne tardai pas à découvrir qu’il manœuvrait pour me faire tomber dans un piège ; j’eus l’air d’y donner tête baissée, et il jouissait déjà intérieurement de sa victoire, lorsque, voulant me monter un coup que je devinai, il fut pris dans ses propres filets, et par suite de l’événement, enfermé pendant huit mois au dépôt.

Je ne fis jamais connaître à Gaffré que j’avais soupçonné sa perfidie ; quant à lui, il continua de dissimuler la haine qu’il me portait, si bien qu’en apparence nous étions les meilleurs amis du monde. Il en était de même de plusieurs voleurs agents secrets, avec lesquels je me liai pendant ma détention. Ces derniers me détestaient