Page:Viennet - Promenade philosophique au cimetière du père la Chaise.djvu/191

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

salut qui leur reste est fermée par une triple barrière de légions nouvelles. Les plus intrépides frémissent ; aucun n’ose croire à la possibilité de franchir la Bérésina, de repousser les défenseurs de ses rivages. Le maréchal lui-même reconnoît qu’il n’est plus pour eux ni lendemain ni patrie ; mais cette ame, trempée d’acier, comme on le disoit alors, n’en est pas même ébranlée. C’est ici qu’il faut mourir, dit-il à ses soldats ; mais n’oublions point que nous ne devons y laisser que la vie. Il part ; et, contre son attente même, cette triple barrière est enfoncée, le passage est ouvert ; et la gloire de la France, les débris de l’armée sont sauvés par son audace. Ah ! si de tels exploits ne suffisent point aux yeux de la postérité pour effacer le crime d’un jour, flétrissons tous les lauriers des connétables de Bourbon et de Montmorenei, de Biron, de Turenne, du grand Condé lui-même ; car ils furent coupables du même crime ; ils trahirent leurs serments, leur patrie et leur roi ; et, de la place même où je suis, je vois le faubourg et la plaine où le grand Condé repoussa les drapeaux de