Page:Vigny - Poèmes antiques et modernes, éd. Estève, 1914.djvu/89

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
55
éloa

» Ces flambeaux naturels s’allument sous ses pas[1],
» Et leur feu clair la guide et ne la trahit pas.
» Si sa lèvre s’altère et vient près du rivage
» Chercher comme une coupe un profond coquillage,
» L’eau soupire et bouillonne, et devant ses pieds nus
» Jette aux bords sablonneux la Conque de Vénus[2].
» Des Esprits lui font voir de merveilleuses choses,
» Sous des bosquets remplis de la senteur des roses ;
» Elle aperçoit sur l’herbe, où leur main la conduit,
» Ces fleurs dont la beauté ne s’ouvre que la nuit,
» Pour qui l’aube du jour aussi sera cruelle[3],
» Et dont le sein modeste a des amours comme elle[4].
» Le silence la suit ; tout dort profondément.
» L’ombre écoute un mystère avec recueillement[5] ;
» Les vents, des prés voisins, apportent l’ambroisie
» Sur la couche des bois que l’amant a choisie[6].
» Bientôt deux jeunes voix murmurent des propos
« Qui des bocages sourds animent le repos.
» Au fond de l’orme épais dont l’abri les accueille,
» L’oiseau réveillé chante et bruït sous la feuille.
» L’hymne de volupté fait tressaillir les airs[7],
» Les arbres ont leurs chants, les buissons leurs concerts,
» Et, sur les bords d’une eau qui gémit et s’écoule,
» La colombe de nuit languissamment roucoule[8][9].

  1. Var : M, Les (en surcharge : Ces) flambeaux.
  2. Var : M, la conque de Vénus. O, A, la Conque-de-Vénus. B, la Conque de vénus.
  3. Var : M, doit être aussi cruelle,
  4. Var : M, Et dont le sein (fécond biffé) modeste
  5. Var : M, 1er  main, L’herbe écoute ses pas 2e main, texte actuel.
  6. Var : M, qu’un (en surcharge : que l’) amant
  7. Var : M, tressaille dans (corr. : fait tressaillir) les airs,
  8. Chateaubriand, Martyrs, XIII : Aussitôt le démon delà Volupté
  9. Var : M, La colombe en fuyant (corr : de nuit) languissamment roucoule.