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au klondyke

je ne veux pas que vous courbiez plus longtemps la tête devant des chefs. Vos cheveux gris ont conquis le droit de commander un peu.

Vernier tira de sa poche une liasse de billets de banque et la tendit au timonier.

— Prenez ces dix mille francs, lui dit-il. Ils vous serviront à acheter une belle et solide barque dont vous serez le patron.

Baludec se leva comme mû par un ressort, tandis que des larmes brillaient dans ses yeux.

Il resta un instant indécis, hésitant à prendre cet argent, mais Vernier avait aux lèvres un si bon sourire, qu’il se décida enfin.

— Merci, mon capitaine, dit-il avec cette simplicité de l’homme honnête qui comprend toutes les délicatesses ; merci pour ma femme et les petits, car ils auront désormais du pain assuré. De plus, je pourrai accomplir un vœu que j’ai fait, là-bas, au moment où la mort fauchait les camarades.

— Quel est ce vœu ?

— J’ai promis à sainte Anne, si je revoyais Paimpol, d’aller à Auray lui porter un chandelier d’argent. Grâce à votre générosité, je vais pouvoir tenir ma promesse plus tôt que je ne l’espérais.

— Allez donc, mon brave Baludec ; allez embrasser votre famille et accomplir votre vœu ; mais, avant de partir, embrassez-moi !

Une chaleureuse étreinte réunit un instant ces deux nobles cœurs, puis le timonier embrassa Loriot et Valentin, après quoi, il fit promettre à son capitaine qu’il lui ferait