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ESSAIS SUR LE GÉNIE DE PINDARE

perdre, feuille flétrie, la gloire de tes pieds rapides, si une sédition meurtrière ne t’eut chassé de Gnosse, ta patrie. Maintenant couronné à Olympie, et deux fois encore, à Delphes et dans l’isthme, Ergotèle, tu vantes les bains tièdes des nymphes de Sicile, hôte familier de ces campagnes devenues tiennes. »

Dans cette fin de notre dix-septième siècle toujours curieuse de l’antiquité, mais ne sachant plus en réfléchir la splendeur, aux bords de ce couchant déjà moins éclairé, l’imitation de Pindare fut fort essayée, et sa grande poésie admise, en quelque sorte, à correction. Mais les strophes mesquines et dures, que Lamotte adaptait à la lyre thébaine, en faisaient crier les cordes ; et, au lieu de le louer intrépidement, avec Voltaire, de faire de belles odes, on aurait dû lui dire avec le jeune officier, plus digne que lui de traduire Pindare et d’animer d’une grâce nouvelle les noms mythologiques :

Quoi ! de l’ode, dont Polymnie
À ses amants nota les airs,
Tu peux abjurer l’harmonie.
Qu’elle doit aux charmes des vers !
Pindare, Anacréon, Horace
Ont donc abusé le Parnasse
De leurs immortelles chansons ?
J’entends Malherbe qui soupire
De voir qu’on ose de sa lyre
Dédaigner les aimables sons.

La traduction poétique de Lamotte, en effet, lors même qu’il était assez content de l’original et voulait seulement l’orner un peu, devenait une parodie. Veut-