Page:Villetard - Histoire de l’Internationale.djvu/360

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Les prolétaires de Paris, dit le Comité central dans son manifeste du 18 mars, au milieu des défaites et des trahisons des classes dominantes, ont compris que l’heure a sonné pour eux de sauver la situation en prenant dans leurs propres mains la direction des affaires publiques… Ils ont compris que c’est leur devoir impérieux et leur droit absolu de se rendre maîtres de leurs propres destinées en s’emparant du pouvoir gouvernemental. Mais la classe des travailleurs ne peut pas se saisir de la machine de l’État telle qu’elle est, et s’en servir pour ses objets particuliers.

Le pouvoir centralisé de l’État avec tous ses organes, tels que l’armée permanente, la police, la bureaucratie, le clergé, la magistrature, organes façonnés d’après un plan systématique et hiérarchique de la division du travail, est né dans les temps de la monarchie absolue, et il a servi à la classe moyenne comme une arme puissante dans ses luttes contre la féodalité. Cependant, son développement était toujours entravé par toute espèce de fatras du moyen âge : les droits seigneuriaux, les privilèges locaux, les monopoles des municipalités et des corporations, et les constitutions provinciales. Le balai gigantesque de la Révolution française, au dix-huitième siècle, a balayé toutes ces reliques des anciens temps, en même temps qu’il a enlevé au sol social les derniers obstacles à la construction de l’édifice de l’État moderne élevé pendant le premier empire qui, lui-même, est le résultat des guerres de la vieille Europe féodale coalisée contre la France moderne. Sous les régimes suivants, le gouvernement, placé sous le contrôle parlementaire, — c’est-à-dire sous le contrôle direct des classes riches, — devint une pépinière d’énormes dettes nationales et d’impôts écrasants ; avec ses attractions irrésistibles de places, de salaires et de patronage, il devint non-seulement la pomme de discorde entre les factions rivales et les aventuriers des classes dominantes, mais son carac-