Page:Villiers de L'Isle-Adam - Contes cruels.djvu/216

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Faites-vous servir ! 7 fr. 95 avec la boîte ! — Voyez… mesdames et messieurs, voilà l’objet !… L’âme est au fond. Elle doit être au fond ! — Le tableau que vous apercevez là, sur la devanture, au bout de ma baguette, représente l’illustre professeur au moment où, débarquant sur les bords heureux de la Seine, il est accueilli par M. Thiers, le Shah de Perse et une foule de personnages éclairés. — L’instrument est inoffensif ! Totalement inoffensif. Surtout si l’on veut bien prendre la peine de parcourir — (non d’un œil hagard et distrait, comme celui dont vous m’honorez en ce moment sublime, mais avec attention et maturité) — l’instruction qui l’accompagne. Les réactifs employés, — révulsifs, toxiques et sternutatoires, — étant le secret de l’Inventeur, l’Administration des brevets nous interdit, malheureusement, de les divulguer. L’avis nous en est parvenu hier, par les soins du Bureau des cocardes.

» Toutefois, pour rassurer les clients de la Bourgeoisie, classe à laquelle s’adresse, tout spécialement, le professeur, nous pouvons révéler que la mixture contenue dans la boule de cristal multicolore dont se constitue l’Appareil en sa forme, est à base de nitro-glycérine et chacun sait que rien n’est plus inoffensif et plus onctueux que la glycérine. On l’emploie journellement pour la toilette. (Agiter avant de s’en servir.) — Hâtez-vous ! Ces bijoux orthopédiques du cœur sont le succès de l’époque ! On les enlève par grosses ! La manufacture de Nuremberg est surmenée !…