Page:Villiers de L'Isle-Adam - L’Ève future, 1909.djvu/108

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― Non, personne, reprit-il. Miss Hadaly n’est encore, extérieurement, qu’une entité magnéto-électrique. C’est un Être de limbes, une possibilité. Tout à l’heure, si vous le désirez, je vous dévoilerai les arcanes de sa magique nature. Mais, continua-t-il, en priant d’un geste lord Ewald de le suivre, voici quelque chose qui pourra mieux vous éclairer sur le sens des paroles que vous venez d’entendre.

Et, guidant le jeune homme à travers le labyrinthe, il l’amena vers la table d’ébène, où le rayon de lune avait brillé avant la visite de lord Ewald.

― Voulez-vous me dire quelle impression produit sur vous ce spectacle-ci ? ― demanda-t-il en montrant le pâle et sanglant bras féminin posé sur le coussin de soie violâtre.

Lord Ewald contempla, non sans un nouvel étonnement, l’inattendue relique humaine, qu’éclairaient, en ce moment, les lampes merveilleuses.

― Qu’est-ce donc ? dit-il.

― Regardez bien.

Le jeune homme souleva d’abord la main.

― Que signifie cela ? continua-t-il. Comment ! cette main… mais elle est tiède, encore !

― Ne trouvez-vous donc rien de plus extraordinaire dans ce bras ?

Après un instant d’examen, lord Ewald jeta une exclamation, tout à coup.

― Oh ! murmura-t-il, ceci, je l’avoue, est une aussi surprenante merveille que l’autre, et faite pour troubler les plus assurés ! Sans la blessure, je ne me fusse pas aperçu du chef-d’œuvre !

L’Anglais semblait comme fasciné ; il avait pris