Page:Villiers de L'Isle-Adam - L’Ève future, 1909.djvu/162

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générateurs. Oui, c’est là que demeure notre taciturne Hadaly. Elle, une personne et moi, seuls, nous connaissons le secret du chemin. ― Bien que la traversée offre toujours, ainsi que vous allez le voir, quelques chances d’encombre à ceux qui s’y aventurent, ― il serait étonnant qu’il nous arrivât malheur ce soir. Pour le reste, nos fourrures nous préserveront de la pneumonie que le long boyau de terre à parcourir pourrait nous attirer sans cette précaution. ― Nous irons comme la flèche.

― C’est très fantastique ! ― dit, en souriant, lord Ewald.

― Mon cher lord, conclut Edison en observant son interlocuteur, voici donc un peu d’humour déjà retrouvé ! Bon signe !

Tous deux étaient immobiles, le cigare allumé aux lèvres, leurs longues fourrures croisées sur la poitrine. Ils rabattirent les grands capuchons sur leurs chapeaux.

L’électricien précéda lord Ewald : tous deux marchèrent vers ce ténébreux endroit du laboratoire, vers la muraille, maintenant refermée et impénétrable, d’où était apparue Hadaly.

― Je vous avouerai, continuait Edison, que, dans les instants où j’ai besoin de solitude, je vais chez cette ensorceleuse de tous les soucis ! ― Surtout lorsque le dragon d’une découverte me bat l’esprit de son aile invisible. Je vais songer là, pour n’être entendu que d’elle seule, si je me parle à voix basse. Puis, je m’en reviens sur la terre, le problème résolu. C’est ma nymphe Égérie, à moi.

En prononçant ces mots d’un ton plaisant,