Page:Villiers de L'Isle-Adam - L’Ève future, 1909.djvu/230

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sur lesquels sont incrustées, comme sur celui-ci, mille petites aspérités de métal. Or, de même que chacune d’entre elles, piquées d’après un calcul musical, joue exactement (soit en rondes, soit en quadruples croches et en tenant compte des silences), toutes les notes d’une douzaine d’airs de danses ou d’opéras, ― selon que chacune vient se placer, à son rang et plus ou moins rapprochée d’une autre, sous les dents vibrantes du peigne d’harmonie, ― de même ici, le Cylindre, sous ce même peigne qui étreint les extrémités de tous les nerfs inducteurs de l’Andréïde, joue (et je vais vous dire comment), les gestes, la démarche, les expressions du visage et les attitudes de celle que l’on incarne dans l’Andréïde. L’inducteur de ce Cylindre est, pour ainsi dire, le grand sympathique de notre merveilleux fantôme.

En effet, ce Cylindre contient l’émission d’environ soixante-dix mouvements généraux. C’est, à peu près, le fonds de ceux dont une femme bien élevée peut et doit disposer. Nos mouvements, à part ceux de quelques gens convulsifs ou trop nerveux, sont presque toujours les mêmes : les diverses situations de la vie les nuancent et les font paraître différents. Mais j’ai calculé, en décomposant leurs dérivés, que vingt-sept ou vingt-huit mouvements, au plus, constituent déjà une rare personnalité. D’ailleurs, qu’est-ce qu’une femme qui gesticule beaucoup ? ― Un être insupportable. On ne doit surprendre, ici, que les seuls mouvements harmonieux, les autres étant choquants ou inutiles.

Or, les deux poumons et le grand sympathique de Hadaly sont reliés par ce même et unique mou-