Page:Villiers de L'Isle-Adam - L’Ève future, 1909.djvu/325

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photographies, grandeur nature, d’une tête masquée dont il demandait que l’on reproduisît la coiffure et le négligé.

En moins de deux heures, comme il s’agissait d’Edison, les cheveux furent sertis, pesés et bouillis.

L’envoyé remit alors à l’artiste un mince tissu ― un derme capillaire d’un si vivant aspect que le perruquier le tourna et le retourna quelque temps, tout pensif, avant de s’écrier :

― Mais c’est du scalp ! du cuir chevelu ! frais enlevé ! tanné par un procédé inconnu ! C’est culbutant ! À moins que ce ne soit une substance que… ― enfin, tout le dur de la perruque est effacé par ce système !

― Écoutez, répondit l’envoyé d’Edison, ceci moule exactement la boîte crânienne, l’occiput et les pariétaux d’une personne des plus élégantes. À la suite de fièvres, elle craint de perdre les cheveux et désire les remplacer, pour quelque temps, par ceux-ci. Voici les parfums et l’huile dont elle se sert. Il s’agit de confectionner un chef-d’œuvre, ― le prix est indifférent. Attelez donc trois ou quatre de vos meilleurs artistes, ― nuit et jour, s’il le faut, ― à nous tramer cette chevelure sur ce tissu de manière à tromper la nature, en la décalquant. ― Surtout ne faites pas mieux que nature !!! Vous dépasseriez le but ! Identique ! Rien de plus. Vous contrôlerez, à la loupe, sur les photographies, les poils follets, petits cheveux rebelles, et ombres. M. Edison compte sur votre ouvrage d’ici trois jours ― et je ne repartirai qu’en l’emportant.